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Les questions liées aux proches sont parmi les plus difficiles et les plus douloureuses que j’ai eu à traverser au cours de ma décompensation. Il me semble très important de bien faire la différence entre les périodes de décompensations aiguës et les périodes qui suivent. Dans un premier temps, ce que j’ai vécu sur le plan psychique s’apparente à une tornade qui balaye tout sur son passage. Mes hallucinations auditives, mes délires étaient tellement envahissants, puissants, que les autres n’avaient d’existence qu’à travers le prisme de mon regard totalement biaisé. Pendant ces moments-là, je pense que les proches devraient surtout penser à se protéger ; qu’il est essentiel de « limiter les dégâts » sur le plan relationnel, afin d’éviter les traumatismes et de garder des possibles pour la suite. C’est à mon avis, le moment où les professionnels et éventuellement l’hôpital ont à intervenir dans le sens de préserver l’entourage. L’enjeu est très important; puisque dans un deuxième temps, la personne décompensée a souvent un grand besoin de ses proches.

 L’ouragan de Raphael Tuck

Sur le plan intérieur, j’éprouvai une grande solitude ; j’avais le sentiment de vivre des choses incroyables, difficiles, nouvelles, réelles, fascinantes, traumatisantes… que je ne pouvais pas partager avec d’autres. C’est comme si nous vivions dans des univers parallèles et que si personne ne faisait le pas de chercher à comprendre ce que je vivais, je restai totalement seul avec ce vécu intérieur qui bouillonnait, qui débordait. Cette situation pouvait sembler sans issue ; d’une part, mes délires empêchaient la relation aux autres, ils faisaient fuir la plupart des gens et d’autre part, j’avais un grand besoin de relations, de reconnaissance.

J’avais la conviction d’avoir une mission exceptionnelle à réaliser sur terre. Mon incarnation avait pour but de révéler au monde, des éléments qui permettraient de trouver des solutions aux problèmes rencontré par l’Humanité. Malheureusement une partie des humains qui détenaient un pouvoir ésotérique, cherchaient par tous les moyens à m’empêcher de révéler ce message divin. Mes proches, en particulier, avaient été mis sur mon chemin pour bloquer ma réalisation. On comprend bien qu’avec ce type de délire les relations ne sont pas simple… Sur la page de ce site qui concerne les délires, vous avez d’autres exemples qui impliquent la famille.

Si j’avais un conseil à donner aux proches pendant les périodes particulièrement aiguës; c’est  comme je l’évoquais, en premier lieu de se protéger. Puis dans la mesure du possible  d’accorder une certaine écoute à la personne qui délire; il ne sert à rien de tenter de raisonner l’autre, de vouloir le ramener dans la réalité; mais il est essentiel de lui permettre d’exprimer un peu de ce qui l’habite. De cette manière un lien peut être maintenu et  petit à petit, il peut éventuellement devenir  possible de reconstruire une relation plus normale.

Carte publiée à l’occasion de la Fête Nationale Suisse de 1917

Lors des hospitalisations en urgence; beaucoup de personnes se retrouvent pratiquement sans rien et l’hôpital ne fournit pas nécessairement des habits, des produits pour l’hygiène, un minimum d’argent. Si le patient ne peut pas du tout compter sur le soutien de ses proches pendant ces moments-là, il peut se retrouver dans une situation difficile, par rapport à des besoins relevant du quotidien. Les pratiques diffèrent selon les institutions et les services, mais un minimum de lien avec l’extérieur permet de grandement facilité certains aspects très concrets de l’hospitalisation.

Pouvoir compter sur des proches, permet généralement d’obtenir plus facilement des congés; de quitter plus rapidement l’institution hospitalière. Un certain nombre de recherches ont démontré que l’entourage jouait un rôle important dans l’évolution de la maladie psychique. D’un autre côté, je mesure bien à quel point, il peut être difficile pour les proches, de continuer de s’impliquer dans une relation très souvent source de souffrances, de peurs, d’impuissance.

En ce qui concerne ma situation, j’ai conscience d’avoir beaucoup fait souffrir mes proches. Mes délires étaient tellement prégnant, qu’ils ne pouvaient que m’isoler des autres. Pendant cette période, je n’ai pu maintenir que deux liens avec l’extérieur et encore de manière épisodique; le premier avec un couple d’amis et le second avec les membres d’une association qui s’occupe de personnes qui souffrent de troubles psychiques (AFAAP). Dans les deux cas, il s’agissait de professionnels qui avaient une bonne connaissance du domaine de la psychiatrie. Cela ne signifie pas qu’il faille nécessairement être un expert du domaine pour parvenir à gérer ce type de situation, mais c’est vraiment très difficile; d’où l’importance de solliciter de l’aide, par exemple à travers une association de proches.

 

 B. Ciardi – Ragazza che sorride – Jeune fille qui sourit – A smiling girl – Lächeindes Mädchen

J’aime beaucoup cette peinture, qui symbolise pour moi, les moments de joie de l’enfance, l’insouciance, les vacances, la mer… Sur un site qui évoque la schizophrénie, j’ai plaisir à laisser une petite place aux instants de bonheurs présents dans chaque vie.